Média 100% indépendant, en accès libre, sans publicité, financé par ses 1498 donatrices et donateurs ce mois-ci !

Je soutiens Au Poste
Sur les traces des rixes perdues avec Olivier Bertrand

Sur les traces des rixes perdues

Longtemps, dans un autre temps, Olivier Bertrand couvrait les banlieues pour Libération. Il traquait les corrupteurs, racontait les gens de peu, secouait la rédaction. Il y a trois ans, une rixe mortelle dans son quartier d’enfance (Vieillet, une cité de Quincy et d’Épinay-sous-Sénart) le ramène à sa jeunesse, les illusions, les siennes, les nôtres. Pourquoi et comment on est passé des bagarres aux duels sanglants?

Olivier Bertrand est journaliste, auteur et documentariste. Il a déjà publié Les Imprudents (Seuil, 2019).

Puisque vous êtes ici...

Depuis 4 ans, #AuPoste défend les libertés publiques, la gauche critique, l’histoire vivante, les arts de la fugue et les voix qu’on bâillonne.

Depuis 4 ans, nous avons choisi de rendre accessible gratuitement toute notre production car nous croyons plus que jamais à l'information en circuit libre

Aujourd'hui, l’extrême droite est au pouvoir, les libertés sont sous attaque, la gauche est à rebâtir. Plus que jamais, une presse libre, fouilleuse et indocile est vitale.

Tout ça n’a pas de prix. Mais un coût.
Loyer, salaires, matos, transport: vos dons font tourner la machine.
Si vous en avez les moyens, merci d'opter pour un soutien mensuel.
Don à partir de 1€, annulable à tout moment.

La causerie en quelques mots

Ce matin-là, il est passé prendre un café chez son ancien collègue. Mais il n’est pas venu seul. Il a amené avec lui son dernier livre, Une Rixe (Seuil, 2023), sa mélancolie douce, ses souvenirs d’ado, son regard tendre et son analyse percutante. Une discussion complice, bien urbaine, s’engage alors, se tissant au fil des pages, des extraits lus par David Dufresne. Cet échange nous emmène en banlieue, entre passé et présent, entre quête et enquête : quête d’une adolescence perdue, diluée dans les transformations de la ville, et enquête sur les rixes d’aujourd’hui, sur une rixe – entre Vieillet et Épinay-sous-Sénart-, sur une mort, celle de Toumani, 14 ans. 

Je pense que dans les années 90 pour ce qui est des émeutes, dans les années 70 pour ce qui est des rodéos, tu sais dans la banlieue lyonnaise, les Minguettes, etc, y avait, je pense un signal d’alarme. C’est-à-dire, on casse, mais on casse sous les yeux des adultes.  Pour moi y avait comme un appel à être pris en charge, à être entendu. Aujourd’hui ces adolescents-là vont se battre à l’écart des adultes et entre eux. C’est-à-dire que c’est plus sur le mobilier urbain – enfin si, ça arrive, on l’a vu l’année dernière – mais sinon, le reste du temps, c’est sur leurs corps à eux qu’ils tapent, sur le corps de l’autre, mais qui vient du même quartier qu’eux.

Olivier Bertrand

Ce tissu urbain banlieusard, Olivier Bertrand le connaît bien, il est pour lui comme une « loupe » sur notre société, et il le dénoue fil après fil avec nous : son histoire, son quotidien – celui de sa jeunesse – son traitement  médiatique et ses « meutes »de journalistes – dont il veut s’extraire, ses politiques publiques, son isolement, ses « frontières mal placées ». 

  • La question de l’endo-colonialisme (la gestion des banlieues calquées sur un modèle ségrégationniste) notamment développé par M. Rigouste est-il un axe que vous considérez dans votre approche ?
  • Je ne pense pas que, de façon consciente, il y ait eu la volonté de créer des territoires qu’on allait pouvoir gérer comme on a géré les colonies, les territoires colonisés par la France. Par contre  y a plein de similitudes, ça, c’est certain. Dans la façon, précisément, de reléguer les gens ensemble, dans la façon également de rechercher un leader, des leaders.
Twistedn4il dans le chat, puis Olivier Bertrand

Au final, le fil rouge qu’il tire de cette étoffe grisâtre, c’est l’abandon de ces quartiers, l’abandon par une nation encore bien trop raciste, le constat que « ces enfants ne sont pas assez les nôtres ».

Article précédent

AuPoste s'abonne au Chiffon

Article suivant

Attal: déclaration de politique (grève?) générale

×