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Pauline Scherer Nora Bouazzouni #AuPoste

Et si l’alimentation devenait un bien commun ? – Défense d’une révolution sociale

Lutter contre la faim en transformant nos systèmes alimentaires, pour permettre à tous et toutes d’accéder à une alimentation saine et choisie, le tout en favorisant une agriculture durable et un revenu juste des agriculteur·ices : c’est le projet de la sécurité sociale de l’alimentation, imaginé sur le modèle du régime général de la sécurité sociale, fondé après la Seconde Guerre mondiale par Ambroise Croizat.

Une trentaine d’expérimentations sont en cours à Bordeaux, Lyon, Rennes, Paris ou encore Cadenet. Pour ce nouvel épisode de Bouffe de là, Nora Bouazzouni reçoit Pauline Scherer, sociologue et intervenante en recherche-action, qui copilote depuis deux ans la caisse alimentaire commune de Montpellier.

« Se nourrir, ce n’est pas une question de disponibilité, mais d’accès ». Dès les premières minutes, Nora Bouazzouni pose le cadre : alors que la production alimentaire mondiale augmente, l’insécurité alimentaire explose. En France, 8 millions de personnes vivent avec moins de 3 euros par jour pour se nourrir. Une aberration qui ne relève pas du hasard, mais d’un système profondément inégalitaire.


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Un droit fondamental bafoué

Pauline Scherer, sociologue et militante de terrain, travaille depuis une dizaine d’années sur les inégalités alimentaires. Pour elle, le problème est clair : « Il n’y a pas de démocratie alimentaire aujourd’hui ». Loin d’être un choix individuel, nos habitudes alimentaires sont dictées par un marché dominé par les géants de l’agroalimentaire et de la distribution. « Le fait d’avoir 50 marques de yaourts en rayon ne signifie pas qu’on a le choix », ironise-t-elle.

Face à cela, une idée a émergé : et si l’on appliquait à l’alimentation le même principe que la Sécurité sociale ? Un financement par la cotisation, un accès universel et une gestion démocratique. Voilà le projet de la Sécurité sociale de l’alimentation (SSA), actuellement testé à Montpellier et dans une trentaine d’autres territoires.

Montpellier, laboratoire d’une autre alimentation

À Montpellier, la Caisse alimentaire commune repose sur trois piliers :

  1. Universalité : chaque personne reçoit 100 « monas » par mois (équivalent à l’euro) à dépenser dans des commerces et chez des producteurs locaux conventionnés.
  1. Financement par cotisation : chaque participant verse une somme libre, de 1 à 170 euros par mois, selon ses moyens. Une approche basée sur la confiance plutôt que le contrôle social.
  1. Démocratie alimentaire : c’est le comité citoyen qui définit collectivement quels commerces et quels produits sont éligibles.

Les résultats sont spectaculaires : « La première chose que j’ai achetée ? Des légumes. Parce qu’avant, je ne pouvais pas », témoigne une participante. Un ancien chef de cuisine confie, ému : « J’ai mangé des pâtes à la sauce tomate pendant des semaines. La Mona m’a sauvé ».

Manger, mais aussi choisir

Au-delà de l’amélioration immédiate du quotidien des bénéficiaires, l’expérimentation montre que redonner du pouvoir aux citoyens sur leur alimentation change radicalement leur rapport à la nourriture. Finies les courses dictées par la contrainte financière : « Avec la Mona, j’ai redécouvert le plaisir de cuisiner et de partager ». Une participante raconte comment elle a pu offrir des amandes grillées lors d’un apéro avec ses voisins : « C’est un petit détail, mais ça change tout ».

Le projet questionne aussi l’organisation du travail domestique : cuisiner prend du temps, et la charge repose souvent sur les femmes. Le comité citoyen réfléchit donc à inclure des plats cuisinés et des cantines solidaires dans le système.

Un modèle généralisable ?

Loin d’être un simple projet local, la SSA suscite un intérêt grandissant. Fin février, une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale pour soutenir ces expérimentations. « On est à contre-courant du contexte politique actuel », reconnaît Pauline, « mais on crée un horizon mobilisateur ».

Pourtant, l’idée fait son chemin. Les médias s’en emparent, les expérimentations se multiplient. Un tournant est-il possible ? Pour Pauline Scherer, la SSA n’est pas une utopie, mais une réponse politique à un système alimentaire absurde« Manger ne devrait pas être un luxe ».

La Sécurité sociale de l’alimentation, c’est quoi exactement ?

C’est une proposition politique qui vise à garantir un accès digne et universel à une alimentation de qualité, financé par la cotisation sociale, à l’image de la Sécurité sociale de la santé.

Qui peut participer aux expérimentations en cours ?

À Montpellier, toute personne peut rejoindre la Caisse alimentaire commune, indépendamment de ses revenus. Chacun cotise selon ses moyens et reçoit un budget alimentaire sous forme de monnaie locale.

Peut-on vraiment généraliser cette idée au niveau national ?

C’est l’ambition du collectif SSA, mais cela nécessitera un changement de paradigme profond. L’expérimentation permet de tester la faisabilité, de rassembler un mouvement et de pousser les institutions à prendre le sujet au sérieux.


Cet article est le fruit d’un travail humain, d’une retranscription automatique de l’émission par notre AuBotPoste revue et corrigée par la rédaction.

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