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RN, l’heure de vérité(s)

Le 31 mars, on saura. Si la décision de justice dans l’affaire des assistants parlementaires du RN, va redistribuer les cartes. Le Pen Marine: condamnée, jusqu’à l’inéligibilité? Comment peut elle réagir, et le parti, et le jeune loup Bardella, dont on dit que sa place commence à prendre trop de place.

« C’est la grande peur des droites européennes : que l’histoire rattrape leur fiction ». Le Rassemblement national arrive à l’heure des comptes. L’heure d’un verdict judiciaire mais aussi moral, historique, presque anthropologique. Autour de la table, un plateau incisif : Sylvain Crépon, Nicolas Lebourg, Marine Turchi, Michel Deléan. En ligne de mire, ce procès à haut risque pour le RN, né des révélations Mediapart sur les emplois présumés fictifs. Mais au-delà du prétoire, c’est une décennie de banalisation de l’extrême droite qui est passée au scanner. Et l’analyse ne rassure pas.

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On rit jaune dès le départ. « J’aime beaucoup cette entrée en matière médiapartiens, médiapartiennes, je ne connaissais pas », glisse Crépon à Dufresne, qui l’interpelle sur son sourire. L’ambiance est conviviale, mais la tension ne tarde pas à percer. Le tchat s’enflamme vite : « On les aura prévenus, encore et encore », résume une certaine Jojo26. Et pour cause : le plateau évoque des faits graves, documentés, étayés. Des années de travail d’investigation et d’analyse critique.

« Une affaire systémique »

« C’était systémique au RN », affirme Marine Turchi. Elle revient sur l’enquête menée avec Ludovic Lamant. À l’époque, il était à Bruxelles, au cœur du dispositif européen. Tout commence en 2012 : « Le Parlement européen s’interroge sur deux vice-présidents du FN, Florian Philippot et Louis Aliot, employés comme simples assistants parlementaires de Marine Le Pen elle-même. » Très vite, la ficelle est trop grosse. Les recoupements montrent une structure où la cagnotte européenne alimente la machine du parti.

À ce moment de l’échange, impossible de ne pas ressentir le vertige du cynisme. « On rémunérait les cadres du parti avec de l’argent public destiné au travail parlementaire », résume Deléan. Le chroniqueur judiciaire de Mediapart, auteur de seize papiers sur le procès, déroule les implications : « Un détournement à grande échelle, structuré, organisé. »

Une extrême droite plus habile, mais tout aussi redoutable

Nicolas Lebourg prend la parole avec aplomb. « Le RN a changé de ton, pas de fond. Il a troqué les croix celtiques pour des costards, mais c’est la même colonne vertébrale idéologique. » L’historien de l’extrême droite replace le procès dans le temps long. Il rappelle que « le premier grand coup médiatique de Jean-Marie Le Pen, c’était justement à L’Heure de Vérité, en 1984. » Trente ans plus tard, le nom du RN revient dans une affaire de justice. Un symbole, un retour du réel.

« Ils se sont présentés comme les victimes d’un système qu’ils ont instrumentalisé. C’est leur génie : transformer leurs fautes en preuve de leur marginalité », dit-il encore. Dans le tchat, Malik64 s’indigne : « Et après, ça hurle contre les fraudeurs au RSA… » On sent que le sujet touche un point névralgique. La confiance dans les institutions, le poison du deux poids deux mesures.

Populismes, autoritarismes : un effondrement global

Et puis, changement de focale. Samuel Tanner, chercheur à Montréal, entre en scène. Il n’est pas là pour parler du procès, mais d’un autre front brûlant : les masculinistes sur TikTok. Son analyse est tranchante. « Ce sont des incubateurs d’idéologie réactionnaire, des communautés où s’élaborent des formes de radicalité intime. » Pour lui, c’est le même logiciel : crispation identitaire, rejet de l’universalisme, haine des élites et du féminisme.

La transition est redoutablement efficace. Ce que le RN incarne dans les urnes, les masculinistes le diffusent dans les algorithmes. Deux visages d’un même projet politique, celui d’un repli autoritaire. « C’est la même grammaire : il faut remettre les hommes à leur place, les femmes aussi, et imposer une verticalité brutale. »

Le RN face à ses juges – et à lui-même

« Le verdict tombe le 31 mars. Mais le vrai verdict, c’est celui de la société. Que fait-on quand une force politique devient juridiquement douteuse, mais politiquement centrale ? » Dufresne pose la question que tout le monde évite. On sent que ça fait mouche. Dans le tchat, BéréniceR écrit : « Il va falloir choisir entre l’État de droit et la normalisation du mensonge. »

Personne ne répond frontalement. Parce qu’au fond, tout a déjà été dit. Et peut-être que, pour une fois, le silence est la meilleure réponse.

« On rémunérait les cadres du parti avec de l’argent public » Michel Deléan

« Le RN a changé de ton, pas de fond »
Nicolas Lebourg

« Ces communautés TikTok sont des incubateurs réactionnaires »
Samuel Tanner

Pourquoi le procès du RN est-il aussi symbolique ?

Parce qu’il touche à la nature même du parti : sa gestion des fonds, sa transparence, sa prétention à être « comme les autres ». Un mensonge d’État miniature.

Comment Mediapart a-t-il découvert l’affaire ?

Grâce à un travail patient de terrain, notamment de Ludovic Lamant à Bruxelles. Il a repéré l’incohérence des affectations d’assistants parlementaires au sein du RN.

Que risque Marine Le Pen?

Elle risque jusqu’à 10 ans de prison et 1 million d’euros d’amende, même si une peine avec sursis est plus probable. Une condamnation nuirait à son image de candidate « anti-système » et fragiliserait sa stratégie pour 2027 une peine complémentaire de cinq ans d’inéligibilité assortie d’une exécution provisoire est possible. 

Quel est l’impact réel de cette affaire sur l’avenir du RN ?

Potentiellement limité, si l’électorat reste indifférent à la question de la probité. Mais dans le champ politique et judiciaire, c’est un coup dur.

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Cet article est le fruit d’un travail humain, d’une retranscription automatique de l’émission par notre AuBotPoste revue et corrigée par Rolland Grosso et la rédaction.

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