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Vanessa Codaccioni #AuPoste

L’ennemi d’Etat, c’est toi. Avec Vanessa Codaccioni

Réprimer n’est pas une exception. C’est une méthode de gouvernement. Dans Comment les États répriment (Divergences), Vanessa Codaccioni, favorablement connue de nos services, retrace l’histoire d’une répression de plus en plus diffuse, violente, et ordinaire.

Antiterrorisme, prison, dissolution, surveillance : comment l’État élargit sans cesse ses cibles. Militants, manifestants, étrangers… nul n’est à l’abri. Son livre, incisif, documenté, révèle comment la sécurité justifie tout – arbitraire compris. Au Poste, elle révèle que c’est son dernier livre sur le sujet, après vingt ans de travaux.


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« L’ennemi d’État, c’est toi. » D’entrée, Vanessa Codaccioni lâche cette phrase comme un avertissement. Pas un slogan, un constat. Dans Comment les États répriment, elle explore méthodiquement la montée en généralité d’un pouvoir punitif qui ne cesse de s’étendre, de se durcir, de se banaliser. Et sur le plateau d’« Au Poste », la chercheuse ne cache ni sa colère, ni sa clarté.

Pendant vingt ans, elle a disséqué les procès politiques, les dispositifs d’exception, les violences policières, les stratégies de dissolution, les lois antiterroristes. « Ce livre, c’est un bilan de mon travail sur la répression. Et surtout, une tentative de comprendre les modèles qu’elle suit. » Le ton est posé, l’argumentation tranchante. On ne parle pas ici de dérapages : la répression est une méthode de gouvernement.

« La sûreté de l’État prime sur la sécurité des citoyens », explique-t-elle, revenant sur la genèse de l’appareil répressif moderne depuis le Moyen Âge. Ce que les États défendent, ce sont leurs institutions, leur territoire, leur autorité – pas les individus. « La répression ne surgit pas quand l’État est menacé. Elle structure l’État. » Sur le tchat, MarieDesMontagnes commente : « Le plus dur, c’est de voir à quel point c’est accepté. » Et tout le monde acquiesce.

Dépolitiser pour mieux punir

Mais le cœur du débat arrive plus tard, lorsque Codaccioni aborde la dépolitisation de l’action illégale. Et là, le diagnostic fait mal. « Même la gauche a participé à cette dépolitisation. » La figure du militant radical devient celle du délinquant, la dissidence se confond avec la dangerosité. Un renversement que l’État encourage, mais que des partis censés défendre les libertés accompagnent parfois.

« Même la gauche a renoncé à penser la conflictualité politique » 
Vanessa Codaccioni

À ce moment-là, l’émission bascule. Dufresne, alias le taulier, relance avec une question piquante sur l’affaire Tarnac et les dissolutions de collectifs. l’invitée enchaîne : « On dissout aujourd’hui des groupes sur des bases idéologiques, sans même un fait délictuel. » Dissolution de Soulèvements de la Terre, criminalisation de l’écologie radicale, tout est là : punir pour dissuader, dissuader pour gouverner.

Une violence d’État devenue ordinaire

Le livre montre aussi comment la violence d’État s’est diffusée dans tous les recoins de la société : prison, surveillance, fichage, droit d’exception. Rien n’y échappe. Et ce qui était autrefois exceptionnel devient la norme. Dufresne cite une page sur les infractions politiques dans le Code pénal de 1791. Codaccioni commente : « Ce sont les révolutionnaires eux-mêmes qui ont inscrit cette logique punitive. On est les héritiers d’une histoire où l’État protège ses fondements avant ses citoyens. » Le tchat s’enflamme. Jean_VieuxMonde lance : « Et après, on nous parle de démocratie… » Silence dans le live. On sent que ça touche un point sensible.

Une colère lucide

Mais Codaccioni ne se veut ni défaitiste ni cynique. Elle appelle à « comprendre les logiques de la répression pour mieux les combattre ». Pas pour pleurer sur l’État autoritaire, mais pour construire une résistance informée. « On peut politiser à nouveau ce qui a été neutralisé par le droit ou le sécuritaire. » Elle cite les dissolutions comme outil politique, les tribunaux d’exception, les logiques de stigmatisation. Mais toujours avec une volonté : rendre visible ce qui a été dissimulé. « Les États veulent qu’on oublie que punir est un choix. »

À la fin, on sort sonné. Non pas par une accumulation de données, mais par la lucidité limpide de l’analyse. Et par cette phrase, que la maîtresse de conférences prononce en souriant, mais sans rien céder : « Ce n’est pas du complotisme, c’est de la science politique. »

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Pourquoi  affirme-t-elle que la répression est une méthode de gouvernement ?

Parce que ses travaux montrent que l’État utilise la punition non pas en réaction, mais comme mode de gestion ordinaire des oppositions.

Quel est le rôle de la gauche dans la dépolitisation de la répression ?

Selon l’auteure une partie de la gauche a abandonné l’analyse critique des institutions répressives, préférant une posture légaliste.

En quoi les dissolutions actuelles sont-elles problématiques ?

Elles ciblent de plus en plus des collectifs militants sans preuve d’actes illégaux, sur la base d’idéologies ou de discours, ce qui fragilise la liberté d’association.

Pourquoi cette perspective sur la répression est-elle controversée ?

Parce qu’elle bouscule l’idée que l’État protège toujours, et qu’elle oblige à regarder en face des pratiques autoritaires installées dans la durée.

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Cet article est le fruit d’un travail humain, d’une retranscription automatique de l’émission par notre AuBotPoste revue et corrigée par la rédaction.

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