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La (belle) et (terrifiante) «Contre-Histoire d’Internet»

Contrôle social et libertés, hacktivisme et répression, alliances contre nature et échappatoires, Félix Tréguer, membre fondateur de la Quadrature du Net, chercheur associé au Centre Internet et société du CNRS, est avec nous pour notre stream de messe.

On a dit à l’auteur de «Contre-histoire de l’Internet, du XVe siècle à nous jours» (Editions Agone/Elements), qu’il y en aurait pour une heure. Tu parles, ça a duré plus du double. Et ce fut passionnant.

On a causé du contrôle de l’espace public – notamment médiatique – par l’État, de comment il s’appuie sur des stratégies multiséculaires sans cesse renouvelées, qui se sont adaptées à la nouvelle donne introduite par Internet. Comment, depuis la naissance de l’imprimerie, ces stratégies étatiques de censure, de surveillance, de propagande ont pu sans cesse se transformer et parvenir à domestiquer toute contestation. Et, enfin, on a dressé des pistes de sortie.

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L’histoire d’internet se construit sur la coexistence d’une critique anti-technocratique, d’une réponse plus ou moins répressive des États, et, depuis les années 80, de l’utopie militante de l’ordinateur comme moyen de résistance, et du web «comme un espace anarchiste et irrégulable». L’exposé de Félix Tréguer est d’une rare précision. Son récit commence au XVe siècle avec l’imprimerie pour arriver aux années 1990, celles de la domestication de l’accès à l’ordinateur. Avec elle, nous sommes entrés, dit-il, dans «cette phase de lutte fondatrice» pour les libertés, qui s’accompagne «d’une recomposition des stratégies de contrôle des médias, qui permettent d’assurer un ordre social conforme aux attendus du pouvoir

Depuis bientôt 20 ans, on est dans les mêmes configurations, à la fois dans les velléités des États qui cherchent à imposer des modalités de contrôle, et des milieux hérités de ces luttes qui cherchent à défendre les libertés dans cet espace médiatique qu’est internet. On ressasse encore les mêmes méthodes, sur le plan juridique, sur le plan de la décentralisation, sur le fait de mettre en avant les logiciels libres comme une solution automatique, ou la cryptographie comme une stratégie pour subvertir le contrôle des états sur les moyens de communication… Or ces choses ne marchent pas. 

Félix Tréguer

Une stratégie de contrôle basée, d’une part, sur la censure gérée par un «assemblage homme/machine», et, d’autre part, sur «la cooptation, la fusion entre les infrastructures de Big Tech et celles des Etats». Treguer explique que «les techniques et les modalités qui ont été développées par les GAFAM dans un cadre extra-légal» sont «incorporées», puis «institutionnalisées à travers l’adoption de législations.» L’exemple le plus récent est celui du Digital Services Act (DSA), en passe d’être transposé en France, qui indique que dorénavant «ce ne sont plus seulement les discours illicites en vertu du droit des états membres qui doivent être censurés par les plateformes, mais aussi des expressions radicales qui ne tombent pas sous le coup de la loi.» Il y a «la volonté d’élargir le champ des informations soumises à la censure» résume Tréguer, mais aussi le but avoué de mettre les outils de censure des grandes plateformes au service des petites. Autrement dit «de créer des obligations de censure pour tous les acteurs du web.»

C’est vraiment cette mise en scène au niveau du gouvernement français : la loi renseignement de 2015, elle passe, et on nous explique dans l’hémicycle qu’on se plaint de la surveillance d’Etat, mais on file tous nos données à Google, donc franchement on n’est pas trés conséquents, et on ferait mieux de faire confiance au gouvernement français, au ministère de l’Intérieur, plutôt qu’à des entreprises américaines même pas de chez nous… Et tout ce discours-là est extrêmement trompeur. C’est des artifices rhétoriques qui masquent la réalité d’un phénomène de cooptation, de fusion entre les infrastructures de Big Tech et celles des Etats. Et ce qui se passe à travers des textes comme la loi Avia, qui a été censurée par le conseil constitutionnel mais qu’on retrouve dans le texte européen, le Digital Services Act, et tous les aménagements autour des règles de censure et de surveillance, c’est vraiment l’incorporation des techniques et des modalités qui ont été développées par les GAFAM dans un cadre extra-légal et leur institutionalisation à travers l’adoption de ces législations.”

Félix Tréguer

«Comment prendre soin de nos outils de communication ?» Le chercheur nous invite à penser cette question, et avance des pistes de solution : «se réapproprier nos usages», «réactiver un échelon communautaire», «obliger les réseaux à être interopérables». L’utopie est la même : un web autogéré, qui s’émancipe des GAFAM, «tout en étant capable de construire une transversalité dans les rapports de communication.» 

Pour finir, il appelle à «adopter une posture abolitionniste» : «plutôt que d’accompagner cette innovation technologique extrêmement rapide en pensant la contenir, il nous faut être lucide sur notre incapacité collective à maîtriser la trajectoire de l’informatique “au service des flics et des patrons”, et se dire qu’à ce stade, ce qu’on a de mieux à faire, c’est d’appuyer sur la touche pause.»

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