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En guerre contre les cons avec Aurel

Aurel revient avec deux livres dont il a le secret. L’un pour voyager, l’autre pour se souvenir, les deux pour penser. Dans Charlie quand ça leur chante (Futuropolis), Aurel braque son crayon sur une décennie de silence et de désillusion. Dix ans après l’attentat contre Charlie Hebdo, que reste-t-il de l’esprit des dessinateurs tombés ? Peu de chose. Rire est devenu suspect, dessiner un risque.

En parallèle, Aurel publie «Méditerranée» (Futuropolis) explore une la mer des mers, trop pleine d’histoires pour se laisser enfermer dans une seule. De port en port, de siècle en siècle, Omar le migrant croise les savants du passé, et l’auteur sculpte les multiples visages de cette mer frontière.

Dans la même eau, certains se baignent, d’autres se noient. Entre bande dessinée documentaire, récit initiatique et fresque géopolitique, Aurel tisse un fil entre les peuples, les siècles, les cultures. On est pas loin du chef d’œuvre. Avec lui, on a passé de belles heures. Merci Aurel!

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En guerre contre les cons!

«On n’a pas besoin d’être pessimiste pour dessiner le désastre»

Aurel de son vrai nom Aurélien Froment est Au Poste en visio en direct depuis Montpellier avec ses deux nouveaux livres, Méditerranée et Charlie, quand ça leur chante. Il livre des récits dessinés aussi puissants que politiques. Et l’émission se transforme en conversation tendre et piquante, entre souvenirs de presse et rage de dessiner.

À travers ses mots comme à travers ses planches, le dessinateur trace une ligne claire : celle de la mémoire, de la nuance et du refus des évidences. Le tchat s’invite dans la danse, l’échange devient collectif, entre rires complices et tensions sourdes. C’est de la BD, mais c’est surtout du journalisme. C’est politique, mais c’est surtout de l’intime.

«Je ne suis pas sûr qu’on puisse encore rire de tout»

Dès les premières minutes, il affiche la couleur : pas question de flatter ou de plaire, mais de raconter. Le fil rouge, c’est son rapport au monde. « Dans Méditerranée, j’essaie de montrer les fragments d’un continent qu’on regarde trop souvent de loin », dit-il. Le projet, pensé comme une BD documentaire, épouse le format du kaléidoscope : un foisonnement d’histoires, de visages et de fragments visuels, sans jamais céder au spectaculaire.

Dufresne le dit d’entrée : « Peut-être un chef-d’œuvre », rien de moins. Aurel esquive, modeste. Mais la puissance du récit est là, page après page, dans ce qu’il appelle « le documentaire dessiné ». Pas une fiction, pas une chronique : un tissage. « J’ai mis trois ans à faire Méditerranée », explique-t-il et chaque case en porte la trace.

Pendant l’émission le tchat est très attentif, il sera plus actif lors de l’évocation du second livre.

Dix ans après Charlie: ce qu’il reste à dire

Dans Charlie, quand ça leur chante, le réalisateur ne cherche pas la commémoration. Il veut comprendre. « Il y a eu dix ans de silence. Et dix ans de glissements aussi », dit-il. La BD revient sur les trajectoires des survivants, sur les silences embarrassés, sur l’impossibilité du rire libre dans un monde de plus en plus crispé. L’ouvrage prend le parti de l’analyse, pas de la nostalgie. Et la phrase revient : « Dessiner est devenu risqué ».

« Dessiner, c’est plonger dans le désordre du monde » « Charlie, c’est un peu le fantôme qu’on ne veut pas affronter »  

Il se livre : « J’ai quitté Le Monde en avril 2024. Aujourd’hui, je travaille uniquement pour le Canard Enchaîné ». Un choix rare, un CDI d’exclusivité, et surtout une fidélité à un journalisme sans algorithmes.

Le dessin comme engagement, pas comme posture

La discussion glisse naturellement vers le statut du dessinateur de presse aujourd’hui. Le tchat réagit fort à une de ses phrases sur la difficulté de trouver sa place sans se travestir. Un certain Jean-Luc dans le tchat écrit : « On sent la lassitude mais aussi l’obstination. Merci pour ça ».

Et l’on revient à la Méditerranée : « Le mot qui a débloqué le livre, c’est kaléidoscope », raconte-t-il. L’idée ne vient pas de lui, mais d’un ami historien, Guillaume Calafat. À partir de là, tout se met en place : les récits éclatés, les styles graphiques qui se mêlent, les passages de pays en pays sans volonté d’unifier à tout prix. Pas de message, pas de leçon. Une attention aux voix et aux visages. « Le rire est devenu suspect »  

Une parole modeste, un regard vaste

Le plus frappant, c’est cette façon qu’il a d’être à la fois discret et profondément politique. Il ne joue pas les héros. Il regarde, il dessine, il écoute. Et il rend. « Ce que je fais, c’est de l’observation. Je ne cherche pas à convaincre », lâche-t-il. Mais ça percute. La violence de l’histoire de Charlie, les effacements successifs, le rôle ambigu des médias : tout est là, à peine suggéré, mais profondément ressenti.

On sent que le sujet reste à vif. À plusieurs moments, l’émotion affleure, il ne théorise pas. Il raconte ce qu’il a vu, ce qu’il a vécu, ce qu’il continue de porter. À ce moment-là, on ne pouvait qu’être d’accord avec lui. Il ne s’agit pas d’être neutre. Il s’agit d’être juste.

FAQ 

Pourquoi Aurel parle-t-il de kaléidoscope à propos de la Méditerranée ?

Parce que ce mot résume l’idée de diversité, de fragmentation et d’interconnexion qu’il voulait transmettre dans sa BD documentaire.

Que s’est il passé à la rédaction de Charlie Hebdo?

Le 7 janvier 2015, deux hommes armés attaquent la rédaction du journal  à Paris, tuant 12 personnes, dont plusieurs dessinateurs emblématiques comme Cabu, Charb, Wolinski et Tignous. Les frères Kouachi, auteurs de l’attentat, revendiquent leur geste au nom d’Al-Qaïda, reprochant au journal ses caricatures du prophète Mahomet. L’attaque provoque une onde de choc mondiale et relance un débat brûlant sur la liberté d’expression, la laïcité et le terrorisme.

Quelle est sa maison d’édition?

Les deux derniers livres sont publiés chez Futuropolis : Méditerranée en  2024 et Charlie, quand ça leur chante , en janvier 2025.

Cette maison d’édition est reconnue pour son engagement dans la bande dessinée de reportage et d’auteur.

Quel est le rôle du dessin de presse aujourd’hui selon Aurel ?

Un outil de documentation, de résistance, mais aussi une manière de continuer à interroger le réel là où les mots ne suffisent plus.

Cet article est le fruit d’un travail humain, d’une retranscription automatique de l’émission par notre AuBotPoste revue et corrigée par Rolland Grosso et la rédaction.

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