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Maureen Kearney Marc Endeweld #AuPoste

Quand alerter devient danger: l’histoire glaçante de Maureen Kearney (Areva)

Pour ce sixième numéro de la « boîte noire », je vous propose de rencontrer Maureen Kearney, une syndicaliste de la CFDT qui défendait les salariés d’Areva et qui a lancé l’alerte sur des contrats suspects entre la Chine, EDF et Areva pour construire des centrales nucléaires à bas coût (contre de nombreux transferts de technologie vers l’Empire du milieu). Le tort de Mme Kearney ? Avoir cru, au nom de l’intérêt général, pouvoir lancer l’alerte auprès de l’État. Car, en retour, et contre toute attente, une mécanique glaçante s’enclenche…

Pendant plus de dix ans, Maureen Kearney a porté seule un secret d’État. Syndicaliste chez Areva, elle découvre un accord opaque, impliquant la France, la Chine et les fleurons du nucléaire. Quand elle alerte, la machine s’emballe : menaces, viol, procès, condamnation pour dénonciation mensongère… avant l’acquittement. Dans Au Poste, elle revient sur ce cauchemar d’État avec une dignité désarmante. Un face-à-face bouleversant entre une femme debout et une démocratie qui préfère détourner le regard. L’interview est autant une leçon de courage qu’un miroir tendu à nos institutions. À ne pas manquer.

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« J’ai été utilisée, puis broyée. »

Maureen Kearney parle calmement. Mais ses mots claquent comme des détonations. Pendant une heure et demie, elle raconte l’horreur : la sienne, celle du système, celle d’un pays qui préfère sacrifier une femme plutôt que d’assumer ses fautes. Face au taulier, Maureen déroule les faits. Areva, la fusion avec EDF, les accords secrets avec la Chine. Et cette conviction, limpide : « Ce que j’ai vu, ce que j’ai su, ils ne voulaient pas que ça sorte. »

On écoute, suspendus. Le tchat, lui, s’emporte et s’indigne.
« Elle incarne la dignité qu’on ne voit plus chez nos responsables », écrit Claire_Mnt.
Jean_Tchik renchérit : « C’est un récit de guerre. Guerre d’influence, guerre contre la vérité. »
Et c’est exactement ça : une guerre. Où Maureen, seule, devient cible.

« J’ai été trahie par la justice »

Son histoire, on la croit sortie d’un film noir. Syndicaliste CFDT, elle tente d’alerter sur un projet de transfert de technologie nucléaire vers la Chine. Des accords signés dans l’ombre, impliquant EDF, Areva et Alstom. Elle fait ce que la République attend d’un citoyen : elle parle. Et là, tout bascule.

Un jour de décembre 2012, elle est retrouvée chez elle, ligotée, violée, un « A » gravé sur son ventre. Les policiers la questionnent, doutent. Très vite, on retourne l’histoire contre elle. Elle devient l’accusée. Le 8 décembre 2017, Maureen est condamnée à de la prison avec sursis pour dénonciation mensongère. « La justice m’a trahie. Elle m’a détruite deux fois », dit-elle.

Le grand silence du nucléaire français

Dufresne l’interroge sur ce qu’elle a découvert : le deal avec la Chine, le rôle de hauts responsables, le silence politique. Elle ne lâche rien : « Tout le monde savait. À l’Élysée, chez Areva, à Bercy. Mais ils ont préféré protéger leurs intérêts. » Ce que Maureen Kearney dévoile, c’est un système verrouillé. Un État qui pactise avec les puissances, sans jamais rendre de comptes. Un monde où la transparence est un danger. Et où les lanceurs d’alerte ne sont pas des héros, mais des ennemis.

« J’ai payé le prix fort pour avoir voulu protéger l’entreprise »
Maureen Kearney

« On voulait me faire passer pour folle »

L’un des moments les plus glaçants survient quand elle évoque les expertises psychiatriques. Après son viol, elle est soupçonnée d’avoir mis en scène son agression. « On a osé dire que j’étais mythomane. Que je cherchais à attirer  l’attention. C’était une manière de m’annuler. » Elle résiste. Elle continue de dire sans sourciller. Le regard de son interlocuteur se trouble : on sent que le poids de ce récit pèse.

Rire malgré tout

Et pourtant, au milieu du tragique, il y a des instants d’ironie. Elle se moque, doucement, de ceux qui l’ont sous-estimée. Elle cite des phrases d’avocats, d’experts, avec une précision chirurgicale. Le tchat salue sa mémoire, sa détermination. « Une mémoire de juge, une parole de poète », glisse AmalC. À ce moment-là, on ne peut qu’être d’accord.

L’État contre la vérité

L’affaire Kearney, c’est une tragédie républicaine. Un cas d’école de ce que produit une démocratie malade de ses zones d’ombre. L’entretien devient politique, au sens noble. Il interroge notre rapport à la justice, à la raison d’État, à la vérité. Maureen, elle, reste digne, toujours.

« Le nucléaire est un monde de secrets. Et ceux qui les brisent, on les abat. »
Maureen Kearney

Une lumière dans le noir

Son acquittement en appel en 2018 est passé inaperçu. « J’ai été salie en Une, acquittée en bas de page. » La formule est terrible. Le système médiatique est lui aussi mis en cause. Silence gêné. Et nous, spectateurs, complices involontaires de cette mécanique infernale. Et pourtant, elle ne crie pas vengeance. Elle veut comprendre,témoigner. « Je ne veux pas me venger. Je veux que ça serve. »

« Ils m’ont sous-estimée. Ça, c’est leur erreur. »
Maureen Kearney

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Pourquoi l’affaire Areva dénoncée par Maureen Kearney dérange-t-elle autant ?

Parce qu’elle révèle un pacte de silence entre industriels, hauts fonctionnaires et politiques. Ce que Maureen Kearney a mis au jour dépasse l’entreprise : c’est une affaire d’État, mêlant pouvoir nucléaire, géopolitique et secret défense.

Quelle forme de corruption Maureen Kearney dénonce-t-elle ?

Une corruption systémique, où les intérêts stratégiques de la France sont négociés dans l’ombre, parfois contre l’intérêt général. Elle ne parle pas de valises de billets, mais de deals opaques, d’impunités protégées, et de manipulations judiciaires.

Pourquoi la justice a-t-elle poursuivi Maureen Kearney au lieu d’enquêter sur Areva ?

Parce qu’il fallait un fusible. Plutôt que d’ouvrir une instruction sur les accords nucléaires avec la Chine, la justice a préféré retourner l’accusation contre la lanceuse d’alerte. Une manière d’éviter le scandale d’État.

Quel est l’héritage de Maureen Kearney dans la lutte contre la corruption et pour une justice plus transparente ?

Son combat a ouvert la voie. Il montre que les lanceurs d’alerte sont les sentinelles de notre démocratie. En refusant de se taire, elle a exposé les failles du système Areva et les dérives d’une justice parfois instrumentalisée.

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Cet article est le fruit d’un travail humain, d’une retranscription automatique de l’émission par notre AuBotPoste revue et corrigée par la rédaction.

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