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Colette Braeckman Michael Pauron #AuPoste

Congo / Rwanda: la guerre oubliée, racontée par Colette Braeckman

Depuis fin janvier, la République démocratique du Congo et le Rwanda sont à nouveau en guerre : le groupe rebelle M23, qui sévit dans l’est du Congo et qui est soutenu par Kigali, a fait tomber Goma et Bukavu, les grandes villes de la région du Kivu, où les troubles n’ont jamais cessé depuis trente ans.

« Le M23, ce n’est pas un groupe rebelle comme les autres : c’est un outil. » Dès les premières minutes, Colette Braeckman pose le ton. La journaliste belge, grande figure du Soir, ne se contente pas de dénoncer, elle expose, relie, démonte les rouages d’un conflit trop souvent relégué aux marges de l’actualité. Dans un échange dense et passionné avec le journaliste Michael Pauron et le tchat en ébullition, elle revient sur cette « guerre oubliée » entre le Congo et le Rwanda. Un conflit alimenté par les ambitions économiques, les complicités politiques et le silence de la communauté internationale.


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« On ne peut pas comprendre ce conflit si on ne regarde pas le pillage. » Colette Braeckman insiste : derrière les massacres et les déplacements de population, il y a les minerais, les métaux rares, les routes commerciales. Et un acteur principal : le Rwanda, dont l’armée soutient activement le M23, malgré les dénégations officielles. « Ils n’ont même plus peur d’être vus », dit-elle. Le cynisme est total.

« L’ONU documente, mais ne condamne jamais vraiment. »
Colette Braeckman

Quand son interlocuteur  évoque la passivité de la France, l’invitée répond sans détour : « C’est le silence complice. » Elle pointe du doigt les doubles discours : les grands États qui se disent préoccupés, mais continuent de commercer, d’armer, de protéger leurs alliés stratégiques. Et derrière ce jeu diplomatique, ce sont des villages entiers qui brûlent, des enfants qui fuient, des femmes qui disparaissent. Le tchat s’enflamme : « Où sont les grands médias ?! » écrit InesK. Un autre, Tonton_Makuta, résume ce que beaucoup pensent : « Si c’était l’Ukraine, on en parlerait tous les jours. »

Une mémoire blessée

Ce n’est pas la première fois que Colette Braeckman est confrontée à l’impunité. Elle a couvert le génocide des Tutsi en 1994, elle y était. Elle a vu de ses yeux la mécanique du crime, la lenteur de la justice, les jeux d’influence. « Il faut oser regarder l’Histoire en face », dit-elle, en évoquant aussi la responsabilité coloniale et les compromissions de la Belgique. On sent que le sujet reste vif. La parole tremble parfois, mais ne faiblit jamais.

« Je suis entrée dans le métier avec cette idée : arriver comme une page blanche. » 
Colette Braeckman

Elle évoque aussi sa méthode : lire, rencontrer, mais surtout tout oublier pour mieux écouter. C’est ce regard direct, cette disponibilité radicale qui donnent à ses récits une profondeur rare. Dans Mes carnets noirs, elle revient sur ses six décennies de terrain. Mais ici, ce sont les vivants d’aujourd’hui qu’elle défend : « Chaque jour, des gens meurent au Nord-Kivu dans l’indifférence générale. »

Une géopolitique de l’oubli

Dans la deuxième moitié de l’émission, le débat s’ouvre : la présence de l’armée ougandaise, le rôle de la Chine, les contradictions de l’ONU et cette question : peut-on encore parler de guerre locale ? La journaliste  répond avec gravité : « C’est une guerre mondiale à bas bruit. » Le Congo est au cœur d’enjeux stratégiques bien plus vastes qu’on ne le dit et dans cet échiquier, la vie des civils pèse peu.

La rage froide du journalisme

À plusieurs reprises, on sent chez elle un mélange de tristesse et de colère contenue. Quand elle dit : « Il n’y a pas d’après tant qu’il n’y a pas de justice », on comprend que ce n’est pas juste une phrase. C’est un appel. Un cri. Celui de ceux qui ne veulent pas se résigner.

« L’Afrique des Grands Lacs est notre miroir. Ce que nous faisons là-bas, c’est ce que nous sommes ici. »
Colette Braeckman

Et si ce conflit devenait enfin visible ? Si le journalisme reprenait sa place ? Si les politiques cessaient de protéger les prédateurs ? À la fin de l’émission, l’invitée du jour n’offre pas de solution magique. Mais elle impose une exigence : dire la vérité, coûte que coûte.

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Pourquoi la guerre dans l’est du Congo reste-t-elle aussi peu médiatisée ?

Parce qu’elle est complexe, ancienne, et qu’elle dérange des intérêts économiques puissants. Mais aussi parce que les grandes puissances préfèrent détourner le regard.

Quel rôle joue exactement le Rwanda dans le conflit au Congo ?

Selon Colette Braeckman et de nombreux rapports de l’ONU, le Rwanda soutient militairement le M23, pour contrôler une partie des ressources du Kivu.

Que reproche-t-on à la France et à l’ONU dans le dossier du Congo ?

De ne pas agir, de ne pas nommer les responsabilités, et parfois même de protéger certains régimes. Leur inaction participe au maintien du conflit.

En quoi le conflit au Congo concerne-t-il le reste du monde ?

Parce que les ressources du Congo alimentent les industries du monde entier. Parce qu’une telle impunité crée un précédent et parce qu’il en va de la dignité humaine.

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Cet article est le fruit d’un travail humain, d’une retranscription automatique de l’émission par notre AuBotPoste revue et corrigée par la rédaction.

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