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Confessions d’un (ex) gendarme

Il était gendarme, il a démissionné. Avec ces mots, publiés sur un blog de Mediapart: «Nous, policiers et gendarmes, participons à la criminalisation des classes populaires. Les collègues ne cachent pas leur xénophobie. Je pense toujours qu’il ne faut pas laisser ces métiers à des gens de droite. Mais j’ai envie de rejoindre la lutte face à ce système profondément injuste. Passer de l’autre côté de la barricade, comme diraient certains.»

Ce matin, le dit gendarme était avec nous. Pour nous parler de son geste, de son expérience, de ses déconvenues, de sa colère, de l’esprit de caserne qui règne, et de l’omerta qui plombe. Du regard des gendarmes sur leurs « ennemis » et leurs administrés, du « racisme latent », de la voie hiérarchique, des démissions en cascade et en catimini.

Avant de le convoquer, on lui a demandé de montrer patte blanche. Fiches de paye, photo de lui en uniformes, il nous a tout montré. Il a quitté la maison pandore après quatre années de service. La causerie fut comme annoncée: passionnante.


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L’invité commence par rappeler ce qu’il a quitté : un corps sans syndicat, un «vase-clos »,  «la grande muette». Une parole précieuse , venue rétablir une vérité méconnue : si la gendarmerie se voudrait plus professionnelle que la police sur certains points, «c’est aussi une force raciste et malheureusement fasciste. […] Si certains pouvaient prendre le pouvoir par la force, ils le feraient.»

Quand on fait un contrôle police route, c’était qui à l’intérieur du véhicule ? C’étaient des jeunes racisés. Forcément si on contrôle plus ces gens-là, on a plus de chances de trouver des choses à leur reprocher. […] Notre pratique policière renforce les préjugés racistes. L’institution est en elle-même raciste.

X, gendarme anonyme

Les classes populaires sont beaucoup plus criminalisées, mais aussi marginalisées, tutoyées avec condescendance, et paternalisme bourgeois. «Un mec avec un bas militaire, sa 86 à la main et son chien, est appelé un PLP, pour pue-la-pisse.”» L’invité dénonce la vision proactive de la police française «qui va chercher le crime, même quand il ne se passe rien» comme avec les contrôles sans justificatifs, les poursuites pour refus d’obtempérer, ou le fait de «sortir les méthodes musclées, avec des gants coqués, limite une cagoule» pour attraper «un mec qui deale 5 grammes devant le lycée

Est-ce que c’est toujours la meilleure idée de poursuivre, d’aller à de grandes vitesses, de mettre nos vies en danger, celles des passants, des personnes qu’on poursuit, pour récupérer deux mecs qui souvent ont juste 2 grammes et un pochon dans la voiture et qui ont pris peur pour rien ?

X, gendarme anonyme

Il dénonce le nouveau paradigme répété en boucle, jusqu’à Macron lui même : «mettre du bleu sur le terrain», sans pour autant connaitre sa population, et au détriment du temps révolu à l’enquête, auquel s’ajoutent les plaintes mal rédigées qui finiront à la poubelle ou la judiciarisation inutile de conflits pour lesquels les gendarmes pourraient faire de la médiation. Il rappelle le «fort discours d’impuissance» qu’il retient de ses collègues : «la justice ne fait pas son travail, on fait des procédures mais les gens seront relâchés de toute façon, donc on est ridicules.»

Pourtant, il appelle les gendarmes à «arrêter de se victimiser», soutenant qu’il y a «plein de métiers qui sont beaucoup plus dangereux» que ceux de policiers. Les bûcherons, par exemple, le Bâtiment. Face aux critiques, à la défiance de la population, la police et les gendarmes restent emprunts de la «mystification d’une police idéalisée», inquiets «de ne plus être craints», d’être «dépossédés de leur pouvoir». En clair, il l’affirme, «la police ne veut jamais se remettre en question». 

C’est nous les gentils contre les méchants manifestants. Ce n’est jamais de notre faute, c’est celle des manifestants qui sont violents. Nous, on ne fait que répondre à la violence. C’est ça le discours maison.

X, gendarme anonyme

La police est entretenue dès l’école dans un «mode guerrier», apprenant à concevoir le manifestant  «comme un ennemi ». Ainsi maintenue dans ce «climat particulier», elle protège les intérêts de la classe bourgeoise – même si elle n’en fait pas partie. Partisan d’une refonte intégrale de l’institution, le gendarme conclut, plein de dépit: «pour que le système capitaliste et néolibéral se maintienne, il y a besoin de cette police qui soit répressive.»

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