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Clémentine Autain convoquée Au Poste : et la république, bordel ?

Suite au débat télévisé Le Pen / Macron, quel vote ? Et la suite : troisième tour, législatives, et autres aventures. On a pris le café avec Clémentine Autain, députée LFI, ce jeudi 21 avril 2022. Elle est venue avec son nouveau livre, « Les Faussaires de la République » (Le Seuil). L’occasion de s’interroger : la République, c’est qui, c’est quoi, c’est où ? Et c’est comment ?

Clémentine Autain démarre en présentant son nouveau livre : Les Faussaires de la République (Le Seuil). Pour elle, c’est Manuel Valls qui a fracturé à gauche en décembre 2016 : « un hold-up fait sur la République, en marchant avec le Printemps républicain dans les pas de l’extrême droite, et en vidant de sa substance le mot République, devenu synonyme de laïcité (très différent de celui de ses concepteurs de la loi de 1905) ». 

La députée dénonce une stratégie pour disqualifier et discréditer tous ceux qui, à gauche, ont critiqué le quinquennat de François Hollande : « un gouvernement qui se revendiquait de la gauche et qui a fait une politique de droite. » Jusqu’à nommer « ennemis de la République » tout contradictoire. Clémentine Autain rappelle que l’ancien Premier ministre avait, sur France Inter, insinué qu’elle avait « noué des accords avec les frères musulmans (sic) » (assommée par cette déclaration, Clémentine Autain avait demandé un droit de réponse – en vain). Ce qui a rendu possible l’usage décomplexé du terme, vide de sens : « islamo-gauchiste ». Pour elle, « ils oublient tout ce qui relève de l’égalité, de la justice sociale et qui est un ferment considérable de cohésion et de lutte contre l’obscurantisme. » Ajoutant que : « les ennemis véritables sont les royalistes ou les terroristes islamistes. »

L’écrasante majorité est profondément attachée à la laïcité et défend une République sociale qui intègre la question écologique, or le gouvernement et l’extrême droite ont réussi à nous diviser. Jaurès disait que la République doit être laïque et sociale mais elle ne restera laïque que si elle est sociale.

Clémentine Autain

Dans son livre, Clémentine Autain déroule le fil historique très fort de l’idéal républicain, dont se revendique ses idées et son parti : « celui des révolutionnaires de 1789, de 1848, et de la Commune de Paris ». La députée revient sur les réactions des Insoumis face aux accusations anti-républicaines : « il y a eu un moment où on a commencé à s’excuser puis à se diviser (au moment des débats sur l’interdiction du voile). » 

Les faussaires de la République, c’est le récit d’une arnaque profonde et insupportable.

Clémentine Autain met en lumière le mensonge majeur de Marine Le Pen : « c’est le visage social, empathique qui comprend les aspirations du peuple d’en-bas, alors qu’elle propose un programme anti-social, qui va accroître les souffrances. Sa mesure de préférence nationale, très concrètement, ce sont des millions de gens qui vont basculer dans l’extrême pauvreté. » Un signal de plus, pour la députée : « elle a réussi à être banalisée sur les plateaux, et à ne pas apparaître comme néo-nazis, c’est-à-dire d’une extrême droite violente. »

Contrairement à ce que voudrait faire croire le Rassemblement national, il existe une opposition frontale avec les propositions de LFI pour améliorer les conditions de vie du plus grand nombre : « que ce soit la hausse du SMIC, des salaires, la hausse des minima sociaux, la retraite à 60 ans, la consolidation des services publics et même la lutte contre l’austérité budgétaire (le blocage des prix, elle est contre) ».

Mettre ou remettre un bulletin Macron dans l’urne contre l’extrême droite est devenu un geste qui nous est insupportable.

Clémentine Autain

La députée esquisse l’envers de Macron, une subversion du langage, telle la novlangue d’Orwell : « il raconte n’importe quoi, tout le temps, les mots n’ont plus aucun sens. Son gouvernement est capable de nous raconter une chose et son contraire. » Pour soutenir son propos, la députée prend l’exemple des débats à l’Assemblée nationale lors de la loi sur l’immigration (« il y a de la fermeté mais beaucoup d’humanité dans ce texte »).

Clémentine Autain compare la Macronie à une forme de monarchie présidentielle avec beaucoup d’autoritarisme. Un projet libéral qui vise « à accélérer les politiques qu’on a depuis 30 ans et qui n’a aucune intention de s’affronter aux normes européennes, en suivant le triptyque : austérité budgétaire, concurrence libre et contrôle social (pénaliser les militants). »

Vos mots sont justes, mais comment se fait-il que les français n’y adhèrent pas vraiment ?

Passioncata | Dans le tchat

L’invitée d’Au Poste le déplore : « c’est un duel qui maintenant devient convenu entre le pouvoir en place et l’extrême droite. »  Le champ politique est pris entre un bloc central celui du gouvernement, qui a fracturé la droite classique et la gauche classique en ramenant au centre ceux qui ont gouverné depuis 30 ans, l’extrême droite et cette gauche forte, franche, représentée par LFI.

En réponse à celles et ceux pour qui Emmanuel Macron et Marine Le Pen se valent, Clémentine Autain rappelle certains points : « le contrôle social et la surveillance seraient renforcés très fortement ; l’autoritarisme fait partie intrinsèque du projet politique de l’extrême droite ». La seule mesure saillante : la retraite à 62 ans plutôt qu’a 65 ans, est un argument dangereux au regard de ce qu’incarne Le Pen. Enfin, la députée de rétorquer, suite au sondage considérant la politique féministe des deux programmes : « l’extrême droite est un ennemi absolu des droits des femmes ».

Dans ce contexte, Clémentine Autain préconise en tant que responsable politique : « de combattre véritablement ses idées sur le fond politique. » Conséquence d’un pouvoir en place, qui a favorisé la banalisation de l’extrême droite en reprenant ses thèmes, et en faisant sauter ses verrous idéologiques. 

On veut Poutou à l’assemblée !

Michbsqz | Dans le tchat

Suite au premier tour des élections présidentielle de 2022, Clémentine Autain évoque la déconvenue à la LFI : « on est sorti dans un état de colère maximale vis-à-vis d’Anne Hidalgo et de la campagne des Socialistes. Néanmoins, une déclaration a été faite par l’intergroupe parlementaire, pour formuler une proposition qui unirait les forces de gauche (ouverte et non hégémonique, mais qui tienne compte du rapport de force sortie des urnes et respectant le pluralisme politique autour d’un projet partagé qui dégage une cohérence d’ensemble. La future NUPES).

Concernant la place des femmes, Clémentine Autain pense que « c’est important qu’elles puissent être candidates et incarner notre famille politique, on a besoin de féminiser notre représentation politique. » Elle cite l’exemple d’Alma Dufour, « qui a basculé de l’activisme à la politique parce qu’à un moment donné elle avait l’impression de se confronter un mur. »

Nous visons vraiment la victoire aux élections législatives en juin. De remobiliser le monde populaire qui souvent ne va pas voter quand il pense que ça ne peut pas concrètement changer sa vie.

Clémentine Autain

Et la député de conclure en évoquant la devise : Liberté – Égalité – Fraternité, affaiblie et maltraitée par les politiques publiques : « la liberté, elle est morte parce qu’elle est devenue un synonyme de libéralisme économique. L’égalité, en réalité, elle est en marche arrière. Et la fraternité, elle est morte dans la mer Méditerranée. »

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