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Citoyens policiers: l’histoire méconnue de ceux qui font la police sans… la police avec Arnaud-Dominique Houte

«Citoyens policiers»: l’histoire (démente et) méconnue de ceux qui font la police sans… la police

Les plus célèbres des citoyens policiers sont les bataillons (révolutionnaires) de la Garde nationale — héroïques ou ventripotents. Mais de 1789 à 2024, ils ne sont pas les seuls. Tentations miliciennes, auxiliaires de tous poils, l’historien Arnaud-Dominique Houte raconte leur histoire (La Découverte). Et il est convoqué Au Poste.

Appui citoyen ou aiguillon sécuritaire, l’histoire recèle de ces volontaires qui revêtent des visages variés : foules révolutionnaires formant leur propre , «amis de l’ordre» et de la police (les incroyables Gourdins réunis), détectives en herbe de la Belle Époque, soldats complices de la répression contre les anarchistes, volontaires ou requis des temps de guerre, gardes civiques de la Libération, enfants enquêteurs des Trente Glorieuses, milices des années Giscard, réservistes de la gendarmerie, Voisins vigilants de nos jours.

Professeur d’histoire contemporaine à Sorbonne-Université, membre du Centre d’histoire du XIXe siècle, cotitulaire de la chaire HiGeSeT (Histoire, Gendarmerie, Sécurité & Territoire[s]), auteur d’une dizaine d’ouvrages, Arnaud-Dominique Houte a notamment publié Propriété défendue. La société française à l’épreuve du vol, (XIXe-XXe siècles) (Gallimard, 2021, prix du Sénat du livre d’histoire) et cosigné l’incroyable Histoire des polices en France. Des guerres de Religion à nos jours (Belin, 2020).

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La causerie en quelques mots

Milices bourgeoises, Montagnards, Voraces, Vésuviennes, Gourdins Réunis, Corps Civil de Sécurité, Amis de l’Ordre, Ligue de Protection Sociale… Connaissiez-vous ces groupes de citoyennes et citoyens auto-organisés, collaborant ou se substituant à la police institutionnelle dans l’exercice de ses missions ? Arnaud-Dominique Houte expose dans son dernier ouvrage ces oubliés des chroniques et des brèves, dessinant ainsi une histoire de notre rapport collectif à l’exercice de la sûreté et de la sécurité.

L’historien dégage notamment deux tendances, en apparence paradoxales, qui ont pu amener de braves gens à s’engager : une tendance civique, de gauche, parfois conduite par le désir d’auto-organisation, qui a existé surtout de manière ponctuelle, brève, dans des moments révolutionnaires ; et une tendance plus droitière, pour des personnes estimant à un moment donné que la police n’était pas en mesure de faire son travail seule.

Pendant la Française, moment de bouillonnement intellectuel dans lequel tout un chacun s’autorise à « tout rediscuter », apparaît l’idée d’une police citoyenne, portée d’abord par des citoyens dits « actifs », propriétaires, ayant des biens et des intérêts à défendre. La Garde Nationale naît de ce double désir de préserver les acquis de la Révolution face aux troupes royales et de protéger ses biens matériels des éventuels désordres et pillages. L’idée de démocratiser la Garde Nationale évolue de manière empirique dans les années qui suivent, de diverses manières selon les villes.

La Garde Nationale est complexe parce qu’elle change tout le temps, et parce qu’elle n’applique jamais ses règlements

Arnaud-Dominique Houte

Tout au long du XIXe siècle, jusqu’à sa dissolution en , la Garde Nationale est composée de volontaires, amateurs, plus ou moins organisés, requis ponctuellement pour des missions de bases, comme des patrouilles. La présence de ces citoyens auprès des professionnels influe forcément sur leur travail. Dans un siècle où la liberté de réunion est encore très restreinte, la Garde Nationale est un haut lieu de discussions et de politisation.

Dans les années 1860, l’empereur Napoléon III lâche du lest sur le droit de réunion, et sur la liberté de la presse. De grands titres comme le récemment créé Figaro appellent parfois à constituer des groupes « d’honnêtes citoyens », comme la pittoresque Société des Gourdins Réunis, toujours dans l’esprit de s’opposer au désordre social éventuel. Ces groupes restent néanmoins des bulles médiatiques sans réel impact au-delà de faits divers ponctuels. Aux yeux de la police et de la gendarmerie, ils ne posent pas de problèmes tant qu’ils ne se structurent pas trop, et qu’ils ne menacent pas leur « monopole de la violence légitime ».

Pendant la IIIe République, on assiste à la monopolisation policière de la sécurité publique. C’est le moment où les effectifs augmentent, la tendance est à la professionnalisation. Du côté des citoyens, on a tendance à moins s’investir directement pour plutôt demander la création de nouvelles brigades.

Arnaud-Dominique Houte

Au début du XXe siècle, la démocratisation des armes à feu et les phénomènes de délinquance d’un Paris grossissant, notamment la « crise des Apaches » – phénomène de délinquance juvénile entre 1900 et 1914 – remettent la lumière sur l’idée de sécurité privée et citoyenne, et un début de « marchandisation de la sécurité » tente une percée, sans trop de réussite. Le mouvement de fond des décennies suivantes est plutôt une demande de renforcement de la police institutionnelle, qui aboutit sous le régime de Vichy avec la nationalisation de cette dernière en 1941. Les citoyens souhaitant prêter main forte le font alors en informant les policiers, suivant la mode littéraire des détectives, ce qui atteint son paroxysme pendant la Guerre avec la massification de la délation, même si cette pratique garde mauvaise presse et ce, d’autant plus dans les décennies post-guerre.

La fin de la Seconde Guerre Mondiale et la nationalisation de la Police sont l’occasion d’une recomposition profonde de celle-ci, bien qu’incomplète. Parmi les citoyens s’étant engagés pendant la guerre comme résistants ou comme collaborateurs de la police, certains seront incorporés dans ce nouvel organigramme comme Compagnies Républicaines de Sécurité (CRS). Il faudra quelques années, et la répression des grèves des mineurs en 1947-1948 pour que se configurent totalement ces nouvelles brigades. Les anciens résistants communistes se désengagent plutôt que de s’attaquer au mouvement ouvrier, les anciens vichystes restent.

Quand j’ai conçu le livre, je suis parti du présent, je voulais écrire sur le présent.

Arnaud-Dominique Houte

Les profondes transformations de la société et des modes de vies de la seconde moitié du XXe siècle voient le retour au premier plan de formes d’actions citoyennes directes, parmi lesquelles les ratonnades – policières mais pas seulement – dans le contexte post-colonial des années 1970/80, les milices d’extrême-droite, les collectifs de « voisins vigilants ». Les années 1990 amorcent le retour en grâce de la pratique de l’information policière.

Si, à toutes ces époques, ces groupes-là ne sont jamais allés très loin, c’est parce qu’il y avait du monde en face pour les dénoncer.

Arnaud-Dominique Houte

Chose rare pour un historien, l’auteur s’engage jusque dans sa propre époque – la nôtre – et l’analyse à la lumière de l’histoire qu’il dresse. Il nous alerte notamment sur le fait que les actions directes des milices d’extrême-droite bénéficient de nos jours d’une complaisance inédite – peut-être seulement égalée dans les années 1930 – du discours politico-médiatique ambiant.

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